Comment accompagner l’enfant qui est confronté au deuil d’un parent?
1- La compréhension de la mort suivant l’âge
La compréhension de la mort est différente suivant l’âge de l’enfant, sa personnalité et les circonstances qui entourent le décès du parent. L’accompagnement dans le soin, dans le cadre d’un accompagnement en art-thérapie, devra permettre à l’enfant de découvrir de nombreux supports pour choisir ce qui lui plait avec lesquels il se sent libre de s’exprimer.
Ce n’est que vers sept ans que l’enfant comprend le caractère permanent de la mort avec les acquisitions qu’il fait sur la question de la durée et du temps. Avant cela « la mort » est un concept flou.
Le bébé ressentira l’absence corporelle de la personne qui s’occupe habituellement de lui et il vivra les effets du deuil au travers des émotions ressenties par le parent. Il pourra chercher ce parent absent ou se mettre en retrait pour se protéger. Entre 3 et 5 ans, l’enfant commence à poser des questions sur la mort et reste dans l’attente du parent décédé. La pensée magique qui lui fait penser que ce qu’il dit et pense se réalise vraiment peut l’amener à se sentir coupable de la mort du parent.
Entre cinq et sept ans l’enfant commence à comprendre le caractère irréversible de la mort. C’est à cet âge qu’il s’intéresse aux animaux morts, aux histoires de morts, sans pour autant penser qu’il mourra un jour.
Vers huit ans, l’enfant comprend véritablement le caractère permanent de la mort vécue alors comme un processus naturel et universel. Confronté à la perte d’un parent, il peut alors s’enfermer dans le silence parce qu’il se sent bizarre, honteux ou coupable d’être différent des autres enfants.
Entre neuf et onze, il oscille entre être petit ou être grand. En se montrant « grand » il rejoint le parent dont il s’approprie les émotions et les réactions, au risque que son deuil vécu intérieurement n’échappe au parent. Il peut aussi adopter une posture protectrice à l’égard d’un petit frère ou une petite soeur pour le.a réconforter ou soulager le parent, au risque, là encore que son deuil passe inaperçu aux yeux du parent qui peut s’accommoder de cette « sagesse apparente ».
Quel que soit l’âge de l’enfant cependant, il s’agit de veiller à ne pas mettre l’enfant à l’écart de tout ce qui se dit ou se passe autour de la mort de ce parent, en choisissant ses mots tout en utilisant un vocabulaire clair et sans ambiguïté. Parler du parent qui s’est « endormi » ou « parti en voyage » ou enfin « monté au ciel » semble plus doux mais il peut générer beaucoup d’angoisses à l’idée de s’endormir et où l’idée de voyage pourra générer l’espoir de l’éternel retour du parent avec la question sous-jacente de l’abandon du parent.
“L’important, toujours, c’est de lui dire la vérité. Si on la lui cache, c’est que l’on considère qu’il y a eu une faute.” dit Françoise Dolto.
En participant au rite funéraire sur lequel des mots auront été posés en amont, l’enfant vit sa douleur et la mêle à ceux des autres personnes, et peut éprouver un réconfort dans les mots posés, les témoignages et les marques d’affection. Il pourra être invité à faire ses adieux de manière symbolique par le biais d’un dessin, d’un poème, d’une bougie etc.
2- L’art-thérapie comme support de soin adapté à l’enfant
Le chagrin de l’enfant se traduit plus par des comportements ou des attitudes que par la parole. L’art-thérapie est ainsi une démarche créative adaptée aux enfants en situation de deuil. La capacité de l’enfant à vivre des émotions fortes est limitée. L’enfant peut être triste pendant quelques minutes avant qu’un stimulus vienne interrompre sa pensée et détourne son attention. L’enfant, même s’il peut ressentir les mêmes réactions physiques, émotionnelles ou de comportement que l’adulte, continuera à jouer pendant son deuil. L’enfant n’a pas non plus la maturité psychique et symbolique suffisante pour mettre des mots sur ses émotions sur ce concept abstrait qu’est la mort.
Art-thérapie, méthode de soin non verbale… oui, et les dispositifs proposés permettront à l’enfant de jouer, jouer sa joie, sa peine, sa tristesse, sa colère, sa peur, un sentiment d’abandon, ou de culpabilité qu’il pourra ressentir, par le biais du jeu de sable, des marionnettes, du modelage, du dessin, du collage, du conte ou du mime, favorisant l’expression de sentiments douloureux trop difficiles à mettre en mots. L’enfant peut donner forme à la matière et par extension à ses ressentis, ses émotions, ses questionnements. L’art-thérapie a donc cette double fonction, une fonction éxutoire et une fonction symbolique par le biais de la création qui permet un espace personnel, intime et protégé d’expression des émotions. La pratique artistique joue un rôle intermédiaire qui permet à l’enfant de s’exprimer à sa manière et qui facilite la communication.
Mais la parole pourra s’y glisser aussi quand dans le jeu, et dans le mine de rien, l’enfant évoquera ce parent absent. Le dialogue pourra être engagé simplement et avec délicatesse.
Mis en confiance à travers l’alliance thérapeutique avec l’art-thérapeute, dans un cadre sécurisant et bienveillant, l’enfant sentira un espace où la parole est permise, sans crainte de peiner ou de « choquer » et où son émotion sera accueillie. Si les mots ne sortent pas, les émotions s’expriment dans la création et parce que l’enfant aura « déchargé » ses émotions dans l’acte créatif il y aura déjà un mieux-être qui pourra, un moment donné, permettre à l’enfant de mettre des mots ou vouloir parler de son parent perdu. Cette parole devra être écoutée, questionnée en douceur, dans une attitude bienveillante, simple, et authentique.
Marcel Rufo : Comment parler de la mort aux enfants? »
Tu n’es pas seul – accompagner l’enfant en deuil – M.M de Kergolay-Soubrier
Le deuil à hauteur d’enfant – Ecoute psychanalitique – Christiane Barcet
L’enfant face à la mort d’un proche – Isabelle Gravillon Dr Patrick Ben Soussan
L’enfant confronté à la mort d’un parent – Dr Patrick Ben Soussan
Vivre le deuil au jour le jour Christophe Fauré
Mort mais pas dans mon coeur – Josée Masson
Accompagner l’enfant en deuil – Guide pratique
Si on parlait de la mort – Dr C. Dolto
Au-revoir Blaireau – Susane Varley – Gallimard jeunesse
Tu vivras dans nos coeurs pour toujours – album jeunesse
La mort expliquée aux enfants Dr Jean-Jacques Charbonnier